Les multinationales étrangères installées au Cameroun sont régulièrement impliquées dans des violations des droits humains ou des atteintes à l’environnement.
Lesdites entreprises transnationales, qui dans certains cas sont plus « puissantes » que l’Etat ont longtemps mené leurs activités dans un contexte de « faiblesse » de l’Etat de droit en de nombreux endroits sur le territoire du Cameroun et dans un certain flou juridique sur leurs responsabilités en matière de droits de l’homme. Plusieurs actions ont été intentées en justice par les victimes de ces multinationales. Il n’y a jamais presque eu d’issue favorable aux plaintes formulées par les victimes. Les exactions sont devenues monnaies courantes.
Nous allons nous appesantir sur trois entreprises majeures qui constituent l’essentiel des multinationales les plus représentatives au Cameroun :
Lafarge, actionnaire majoritaire de la société Cimencam
On a constaté que la majorité des employés des entreprises Sous-traitant de Cimencam, n’ont pas de contrat de travail et ne bénéficient pas de congés, encore moins de garantie de sécurité sociale.
Pour juguler ces insuffisances, la Cimencam devrait s’engager à inclure dans leurs contrats respectifs avec leurs Co-contracts ou Sous-traitants des conditions similaires au respect du droit de travail des employés.
Les employés de la Cimencam de la carrière de Bergui, travaillent sous une chaleur étouffante qui se situe à plus de 45°. Des employés exposés aux rayons du soleil ne bénéficient de protection quelconque. Pourtant des instructions de sécurité pouvaient être prodiguées par les services de la Cimencam. Notamment :
Cimencam peut fournir aux employés des parasols,
Cimencam peut doter ses employés des chapeaux à large bord,
Cimencam peut mettre à la disposition de ses employés exposés au soleil, des lunettes de soleil munies d’une protection contre les UVA et les UVB.
Au regard de ce qui précède on peut remarquer que les conditions de travail infligées aux travailleurs de la carrière de Bergui sont largement inhumaines et inadmissibles dans un environnement économique qui prospère.
En outre, les riverains sont les premières personnes affectées des impacts négatifs de la destruction progressive et insidieuse de l'environnement par la consommation importante en eau de la nappe phréatique.
Des nouveaux permis de recherches ont été attribués à la Cimencam, pour lui permettre d’explorer des sites à forte concentration des populations dans le canton de Biou. L’absence de communication autour de ce permis laisse croire que les populations ne seront pas associées à la décision d’exploiter (le moment venu). Toutefois, les populations tentent de s’organiser pour faire échec aux velléités nauséabondes de LaFarge.
Groupe Bolloré et sa holding Socfin sont actionnaires majoritaires chez Socapalm
Le 30 juin 2000, la Socapalm sera privatisée avec la signature à Yaoundé de la Convention de Cession de 90% des actions détenues par l'Etat du Cameroun pour une valeur de 21 milliards de FCFa, suivie de la signature le 30 juin 2000 d’un bail emphytéotique accordant à la Socapalm des terres rurales pour la réalisation de son objet social ceci pendant une durée de 60 années entières, consécutives et renouvelables, moyennant une redevance annuelle de 392 645 000 fcfa.
Avec un chiffre d’affaire sans cesse croissant, la Socapalm, filiale du Groupe Bolloré, connait un climat social particulièrement tendu. Avec la clé, des licenciements abusifs, des expropriations des terres, des cas de pollutions des eaux, de l’air etc.
Même s’il est vrai que la Socapalm à travers sa production d’huile de palme et de ses produits dérivés contribue au développement économique du Cameroun, il est tout aussi vrai que dans le cadre de ses activités agroindustrielles, elle impacte négativement l’environnement social dans lequel elle est implantée.
Herakles Farms,
Mega-Uranium, société canadienne plie bagage et laisse derrière elle des dégâts
Pour explorer les gisements d’uranium au Cameroun, Mega Uranium Limited (société junior minière canadienne cotée au Toronto Stock Exchange) a créé successivement deux sociétés :
1) Nu Energy Uranium Corporation a été incorporée le 13 août 2007 dans le paradis fiscal des Bristish Virgin Islands, cotée à la bourse de Toronto, puis rachetée par Mega Uranium Limited après émission de 28 240 313 de titres (actions) ordinaires, de stock-options et de bons de souscription.
2) Nu Energy Corporation Cameroun SA est une société de droit camerounais que Mega Uranium Limited contrôle à 92%. Cette société sert à Mega Uranium Limited comme cadre de discussion officiel avec les autorités camerounaises.
Bassins de Mega-Uranium pour recueillir les eaux contaminées
Mega-Uranium explore l’uranium en Australie, au Canada, en Mongolie et en Amérique du Sud. Mais c’est seulement au Cameroun que cette entreprise minière possède quelque chose de vraiment tangible, à savoir des concessions sur 4654 km2.
Depuis 2013, Mega-Uranium a arrêté ses travaux de recherches à travers l’ensemble de ses sites de Gouna, Salaki, Kitongo, Teubang (Région du Nord), de Lolodorf (Région du Sud). L’exploration de l’uranium a permis de donner près 300 emplois directs et indirects aux populations riveraines des sites de Kitongo, Salaki, Gouna et Teubang.
Pour qu’une entreprise comme Mega-Uranium fonctionne, il lui faut du personnel. Entre 2008 et 2013, Méga-Uranium a utilisé 5 catégories de travailleurs : cadre, agent de maitrise, ouvrier, manœuvre, chauffeur-mécanicien. Les 95% du personnel étaient payés par l’entreprise Onyx. Celle-ci avait signé avec Méga-Uranium un contrat de prestation portant sur la gestion du personnel. Entre 2008 et 2012, Onyx a recruté 293 personnes parmi lesquelles 12 cadres, 10 chauffeurs-mécaniciens (dont 2 de Poli), 8 cuisiniers (dont 2 de Poli), 160 ouvriers (dont 95% sont de Poli et 4% du reste du Grand nord), 2 agents de maîtrise de Poli. Les salaires des ouvriers oscillaient entre 55 000 à 150 000 fcfa par mois. Les chauffeurs-mécaniciens touchaient plus de 400 000 fcfa par mois.
Il n’y avait aucun employé cadre originaire de la région de Poli. On entend par cadre, les géologues, les chefs de service (logistique et approvisionnement), le chef de projet.
De centaines de millions de francs CFA ont été déversés sur la ville de Poli pendant toute la phase d’exploration. Le panier de ménagère a subi une forte inflation. Cette inflation qui était caractérisée par l'accroissement de la circulation de la monnaie dans la ville de Poli, a sévit sans ménagement sur la classe moyenne et les plus démunis. Les prix des denrées ont triplés sur le marché local. Les commerçants ont fait de bonnes affaires. La ville de Poli a connu un flux massif de jeunes diplômés à la recherche d’emplois. Ceux qui n’ont pas pu être recrutés par Mega-Uranium sont restés sur place pour créer des emplois indirects. Les employés originaires de Poli ont construit des maisons d’habitations, ils se sont mariés à une ou deux, voire à trois femmes. Ils ont acheté des bœufs de labours pour booster la production agropastorale. Certains ont perdu des vies sur le lieu de travail. A ce jour, les familles des victimes (ayants droits) attendent désespérément des indemnisations.
Prise de mesures sur l’un des 300 points de forages de Teubang
L'envers du décor du passage exploratoire de Mega-Uranium :
Perturbations orchestrées sur l’aire protégée de Voko-Bantadjé
Le village Salaki a été le théâtre d’une importante nuisance sonore pendant la période d’exploration. Ce qui a perturbé le comportement des animaux dans la zone d’intérêt cynégétique (ZIC) à gestion communautaire de Voko-Bantadjé. Celle-ci ceinture une grande partie du Parc. Le ZIC de Voko-Bantadjé est en cogestion depuis 10 ans entre M. VISSE (de nationalité Allemande) et le Comité de développement de Voko-Bantadjé.
Précisons que l’existence d’un trouble excédant les inconvénients normaux de cohabitation entre les chercheurs de Méga-Uranium et les espèces animales du Parc, peut justifier la saisine d’un juge compétent, dès lors qu’il est constitutif d’une atteinte manifeste aux droits reconnus aux riverains d’avoir la jouissance paisible du ZIC amodié. Les dommages résultants du bruit des engins de prospection de Méga-Uranium devraient entrainer droit à réparation à partir du moment où ils excédaient les inconvénients acceptables. La limite et la nature de la normalité des troubles de jouissance n’ayant pas été prévues expressément par le législateur camerounais, les titulaires du ZIC de Voko-Bantadjé avaient du mal à engager la responsabilité de Méga-Uranium devant les tribunaux.
On a bien constaté qu’elles se livrent à travers des pratiques abusives sans rapport, et en tout cas, sans lien nécessaire avec une activité faunique durable. On a pu constater sur le terrain que des tranchées et excavations ont été abandonnées et des terres non restaurées par les promoteurs de l’uranium dans la région. On a répertorié plusieurs cas d’accidents : des animaux qui finissent leurs courses dans ces tranchées, en se fracturant la patte.
Il serait pertinent que le Ministre en charge de la gestion des Parc nationaux et le Ministre des mines se penchent sur la question des émissions sonores et des agissements bruyants instrumentés par les entreprises exploratrices des mines dans les parcs.
Nous proposons que les entreprises minières qui explorent dans les aires protégées au Cameroun mettent un terme à cette véritable agression sonore sur le milieu ambiant des animaux.
Faisant suite à tout ce qui précède, nous proposons :
Que l'Etat du Cameroun, à travers ses Départements ministériels compétents en la matière, prenne les mesures appropriées pour assurer la pleine réalisation des droits des fondamentaux des personnes victimes (riverains, travailleurs).
Que l’Etat mette en œuvre des politiques ou des programmes propres à en garantir l’accès et à assurer l’exercice effectif de ces droits.
Que l’Etat du Cameroun soit à mesure de prévenir et réprimer les atteintes aux droits de l’homme commises par toute institution ou entité publique ou privée, notamment les sociétés transnationales, qui se trouvent sous son espace de compétence.
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